Joan Mitchell Fondation Louis Vuitton
Peintre américaine vivant en France, l’une des grandes figures de l’abstraction contemporaine, entre expressionnisme américain et impressionnisme français.
Article Le Monde
ARTS JOAN MITCHELL à Nantes et au Jeu de Paume à Paris
La danse au-dessus du vide.
« Quand je travaille, je ne suis consciente que de la toile et de ce qu’elle me dit. Je ne suis certainement pas consciente de moi-même. Peindre est une manière de s’oublier. Parfois je suis totalement prise. C’est comme faire de la bicyclette sans les mains. Ça n’arrive pas souvent. J’espère toujours que ça va recommencer. « Ainsi Joan Mitchell s »expliquait-elle sur son oeuvre quand elle acceptait de répondre à une question, ce qui n’était pas dans ses habitudes.
L’explication est elliptique et ne peut que l’être, tant il était clair pour l’artiste qu’en dire plus eût été tricher et prétendre analyser un évènement par nature incompréhensible et imprévisible, l’apparition d’un tableau. Là-dessus, Joan Mitchell n’a jamais varié : elle refusait les règles, elle ne croyait pas aux méthodes, elle avait en horreur les systèmes et les catégories. A l’en croire, la peinture « venait » ou ne « venait » pas, voilà tout. Il y avait des jours où il ne se passait rien, où insister aurait été désastreux.
L’expressionnisme abstrait dont elle est issue l’a convaincre de cela, que l’art et la beauté sont libres ou ne sont pas, qu’il n’y a pas de vertu préférable à la liberté, dans l’atelier et hors de l’atelier. Deux expositions concomitantes et complémentaires le démontrent. L’une , à Nantes, déploie dans l’espace du musée des Beaux-Arts une abondante anthologie rétrospective de des débuts à la fin des années 70. L »autre, au jeu de Paume, plus courte et ramassée, célèbre les dix dernières années de l’œuvre, placées encore sous le signe du renouvellement et de la liberté, loin des modes, loin des académistes, puisque jamais, résolument, Joan Mitchell n’a accepté quelque forme que ce soit d’aliénation sociale ou intellectuelle.
Le Monde
Article publié le 26 juin 1994.